"Une conscience aigue de Soi et de l'Autre permet d'ouvrir les portes de la liberté..." Hadria RIVIERE
PARTIE I
UN LIVRE QUI, DERANGE :
« COMMENT ACHETER U SYNDICALISTE »
«L'Argent noir des syndicats» - Fayard- par Roger LENGLET, Jean-Luc TOULY et Christophe MONGERMONT - raconte les méthodes mises en œuvre
pour corrompre les représentants des salariés.
Et lève aussi un coin de voile sur les financements occultes des organisations syndicales.
EXTRAITS :
Gros chèques et petits cadeaux
D'anciens syndicalistes de Thales -ex-Thomson-CSF- nous expliquent que l'UIMM a toujours entretenu de bons rapports avec leur employeur, mais aussi avec leur syndicat.
[...] Quelques mois plus tard, Joseph CRESPO, président de la fédération CFTC de la métallurgie, reconnaissait, au cours d'un entretien réalisé avec nous, l'existence de ces subventions :
«Ces subventions sont faites à tous les syndicats et sont parfaitement légales, même si elles posent en effet un problème d'indépendance.» [...]
Un PDG, juge dans un conseil des prud'hommes, accepte de se confier à nous dans le cadre d'un échange personnel, comme s'il voulait en profiter pour se délivrer d'un poids :
«Je connais beaucoup d'employeurs qui achètent leurs délégués syndicaux pour s'assurer la paix sociale, je ne suis donc pas surpris du tout par l'affaire de l'UIMM.»
Il hésite un peu, puis nous souffle :
«Non seulement je connais des employeurs qui le font aussi, mais je reçois moi-même, lors de chaque élection professionnelle de délégués du personnel, les salariés élus pour leur proposer des petits cadeaux, un véhicule de fonction et un téléphone portable :
en contrepartie, ce que je demande, c'est qu'ils me préviennent afin de régler en amont et en petit comité tout litige qui pourrait déraper.»
[...]Il nous explique qu'aliéner peu ou prou l'indépendance de syndicalistes est «nécessaire à la bonne marche des entreprises, qui, sinon, devraient faire face à des luttes gênantes». [...]
André B., un entrepreneur du bâtiment qui vient de procéder au licenciement de deux ouvriers trop revendicatifs, complète cet éclairage :
«Un permanent syndical capable d'en imposer pour calmer les troupes est très utile [...].»
L'inconvénient, dit un autre chef d'entreprise,
«c'est que certaines exigences peuvent devenir un véritable racket qu'on ne peut interrompre sans prendre le risque de représailles sous la forme d'actions sociales embarrassantes. Ca peut même tourner au harcèlement jusqu'à ce qu'on trouve un terrain d'entente financier. Mais on s'y retrouve plutôt bien, il faut l'avouer». [...]
Du côté syndical, des témoins nous confirment le phénomène.
Daniel Guerrier, délégué syndical cégétiste jusqu'en 2000, témoigne à visage découvert :
«Dans les grandes entreprises du bâtiment et de l'eau où j'ai été élu, j'ai souvent vu des délégués du personnel prendre leurs ordres régulièrement auprès de la direction pendant des repas régulièrement offerts par les cadres dirigeants, bien arrosés et souvent répétés, au cours desquels on se tutoie et on baisse un peu la voix en abordant certains sujets comme le renouvellement du portable ou de la voiture, en passant par les primes spéciales et les horaires très allégés, l'embauche de parents ou d'amis [...].
Au début, je m'étonnais de ne pas les voir retourner au travail l'après-midi, j'ai vite compris que ça faisait aussi partie des petits privilèges des syndicalistes qui acceptent le régime maigre pour les salariés.» [...]
DES « VENDUS » DANS LE NETTOYAGE :
José Tison, un ancien de SUD-Rail qui s'est longtemps investi auprès des salariés du nettoyage, ne craint pas d'affirmer :
«Dans ce secteur, il faut bien le dire, beaucoup de délégués sont purement et simplement achetés par les directions.
Tout reste à faire, ou plutôt à remettre à plat.
Il faut repartir de zéro.»
Etienne DESCHAMPS, juriste du syndicat CNT-Nettoyage d'Ile-deFrance, apporte des précisions :
«Une façon de «tenir» les représentants du personnel est de leur attribuer des petits avantages. Promotion pour devenir chef, voiture de fonction, double salaire -au nom de deux boîtes de nettoyage-, tout est bon, même l'obtention de logements par le 1% patronal. Les DRH ne demandent pas nécessairement à l'heureux bénéficiaire d'abandonner son mandat, c'est plus fin que cela :
ces avantages impliquent «spontanément» une forte baisse du niveau de revendication.
On le constate alors par touches successives : au début, le délégué du personnel vient un peu moins aux réunions, puis plus du tout. Ensuite, ses camarades nous expliquent qu'il délaisse certains dossiers urgents ou qu'il ne s'occupe plus guère de son travail syndical. Pis, qu'il minimise les problèmes des salariés. Enfin, on apprend qu'il a déménagé après avoir obtenu un appartement plus grand, mais sans vraiment s'en vanter. Ce sont souvent des indices forts. Tous les syndicats sont touchés. Le nôtre n'est pas à l'abri non plus de ces tentations.»
PARTIE II- PAGE SUIVANTE